mardi 22 juin 2010

Une femme est une femme


Enfiler une jupe la matin demande une certaine force de caractère. Il y a quelques années, mon père se plaignait que j'arbore un pantalon 355 jours par an. J'essayais de lui faire comprendre que les œillades, les regards de travers, les réflexions que la femme supporte lors de cette journée de la jupe sont psychologiquement lourds à encaisser. Après une journée jupée, la femme a bien besoin d'une semaine de pantalon-camouflage pour s'en remettre. Mais ceci n'est pas vraiment compréhensible pour les hommes. Surtout pour ceux à qui cela ne viendrait pas à l'idée d'utiliser leur klaxon de voiture pour approuver le "spectacle" qui passe devant leur capot, ceux qui n'imaginent pas siffler une femme à son passage ou simplement lui dire qu'elle est "charmante", ceux qui n'iraient jamais se coller contre une femme dans le métro, lors des heures d'affluence, et oser remonter leur main le long de sa jambe.

Un homme ne pourra jamais sentir les regards haineux dans la gare du Nord, alors qu'il fait 30C° et que l'on se balade bras nus-cheveux nus. Ces regards pèsent sur le corps et le cœur. Parfois jusqu'à la nausée. Tous les hommes ne sont pas comme cela, mais une partie d'entre eux osent ces affronts. A Paris, la mode est beaucoup plus féminine qu'à une époque et facilite les choses (l'union des jambes fait la force contre les siffleurs qui n'ont plus assez de salive pour s'exprimer), passé le périphérique, où je ne vais pas beaucoup, les choses n'évoluent pourtant pas.

Hier, j'ai regardé "La Journée de la Jupe" de Jean-Paul Lilienfeld avec une Isabelle Adjani fabuleuse, croisant le fer, armée de Molière et de son revolver. J'avoue que j'avais toujours pensé que seule une femme pouvait parler avec cette exactitude du sujet, mais un homme a fait mieux. Il a fait un grand film sur une génération perdue, un film bien plus pointu, "authentique" que le "Entre les murs" de Laurent Cantet. Pourquoi instaurer une journée de la jupe ? Parce que lorsque les femmes ont décidé de s'émanciper, il n'était pas question de rentrer dans le moule, de s'échapper dans le rien mais que maintenant, on se camoufle, on se voile pour ne pas "choquer". Comme si le seul fait d'être une femme était devenu un délit.

Alors, oui, pourquoi pas une journée de la jupe, une journée du respect, un journée où les hommes et les femmes de demain mettront de côté leurs préjugés pour se regarder droit dans les yeux, sans jugement, et apprécieront la beauté de la différence entre un homme qui est homme et une femme qui est femme. Pour découvrir aussi que l'on peut être égaux tout en étant différents.

Illustration : Garance Doré (illustratrice, photographe, bloggeuse mode pétillante qui illumine toutes les femmes...)

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